
Le cinéma, un art dominé par les hommes, mais défié par des femmes audacieuses.
Le 08 Mars, une date sur un calendrier militant ou l’un des nombreux miroirs tendus à notre époque, à nos combats et victoires inachevées ? Et parmi les arts, le cinéma est sans doute celui qui, depuis plus d’un siècle, a le mieux accompagné ou peut être entravé l’émancipation féminine.
De la muse à la maîtresse de son destin : l’évolution du regard cinématographique
Dans les premiers âge du cinéma, la femme n’a été qu’une image figée, une muse, une épouse soumise, une figure sacrificielle, une tentatrice fatale et un fantasme écrit par des hommes, pour des hommes. Elle était plus un objet narratif qu’un sujet.
Puis vint le temps des brèches et des fissures avec des actrices comme Simone Signoret ou Diahann Carroll. Pourtant l’ombre du patriarcat cinématographique restait omniprésente : combien de réalisatrices avaient alors accès aux caméras ? Aucune.
Si le 8 mars est une journée de lutte, alors le combat pour une industrie plus égalitaire en est l’une des batailles centrales.
Pendant des décennies, les réalisatrices ont été les grandes absentes des génériques, voire une femme derrière la caméra relevait presque du Miracle. C’est en 2010 que la réalisatrice Kathryn Bigelow remporte l’Oscar du Meilleur Film avec son film « Démineurs ». Un retard que je juge inacceptable.
En parallèle, des femmes comme Agnès Varda de la France, Safi Faye du Sénégal et tant d’autres pionnières du cinéma africain, américain et européen ont fait du cinéma un champ de bataille, un espace de résistance et de revendication.
Au Mali, des femmes ont suivi cet appel. Elles ont pris la caméra non pas comme un outil de divertissement, mais comme un moyen de libération. Fatoumata Coulibaly et Assitan Tangara ont mis en lumière des sujets brûlants de notre société : l’excision, le mariage forcé et l’éducation des filles, le tout en influançant la politique et en faisant évoluer les mentalités.
Le 8 mars au cinéma : un engagement, pas une case à cocher
Aujourd’hui, on pourrait croire à une victoire du cinéma féminin avec des réalisatrices comme Céline Sciamma ou Mati Diop, des films comme « Nomadland » de Chloé Zhao ou « Titane » de Julia Ducournau. Mais est-ce réellement suffisant ?
Le Journée internationale des droits des femmes est là pour rappeler que les inégalités persistent :
– À Hollywood, seules 10% des réalisateurs sont des femmes,
– Les héroïnes restent souvent définies par leur rapport aux hommes, et non par leur propre destinée,
– Les salaires sont toujours inégaux, même pour les stars du grand écran.
Au-delà des chiffres, il y a le poids du regard masculin sur les corps et les récits féminins. Combien de films dits féministes sont encore réalisés par des hommes ? Combien de femmes cinéastes se battent pour raconter autre chose que l’éternelle « émancipation féminine » vue à travers un prisme masculin ?
Comme chaque année, le 8 mars est le prétexte idéal à des marathons de films « féminins », une occasion pour les plateformes de streaming et les cinémas de cocher la case de l’inclusivité.
Mais la reconnaissance du cinéma féminin doit-elle être un simple coup marketing ? À mon avis non, car le combat de ces réalisatrices ne se joue pas en une journée, il est permanent, quotidien et intemporel, c’est surtout un effort pour donner la parole aux femmes réalisatrices, scénaristes, productrices et techniciennes.
À l’occasion de la commémoration de la Journée internationale des droits des femmes, il est essentiel de reconnaître et de célébrer le travail des cinéastes (ces héroïnes de l’ombre). Leur contribution à la lutte féminine est inestimable, et leurs œuvres, empreintes de courage et d’authenticité continuent d’inspirer et de provoquer des dialogues essentiels en faveur de la cause féminine.
Le 8 mars est un symbole, mais ces réalisatrices nous rappellent que chaque femme a le droit de choisir, de rêver, d’exister pleinement. Si l’histoire du cinéma doit être réécrite, nous femmes seront celles qui tiendront la plume et la caméra « L’égalité ne se joue pas qu’à l’écran, mais aussi derrière la caméra ».
Natiengueba DIARRA
Journal du Cinéma et de la Télévision
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